Dans le cadre du Festival des Libertés Numériques 2020 à Rennes
Nos corps sont ils des machines ? Des entités manipulables et surveillables comme les ordinateurs ? Données ou captées personnelles ? Un atelier en travail collectif pour tirer les fils de libertés bio-numériques. Depuis les débuts du cyberpunk, au biopunk, jusqu’au gynepunk en repassant par les Lumières ou la rationalisme Allemand, comment comprendre une partie des enjeux des corps aliénés par le numérique et la surveillance morpho-physio-biologique.
Cercle(s) de discussion, alternance entre méthode du cercle samoan et l’arpentage pour la lecture et l’écoute de passage d’œuvres de références.
Les participant·e·s peuvent venir avec de quoi prendre des notes ou enregistrer des sons. Du matériel de base d’écriture sera fourni. Il s’agit autant, par un vécu collectif, d’appréhender des questions philosophiques ou socio-techniques, cherchant ainsi à tisser à plusieurs des liens et partager des ressources.
16 personnes maximum – contact : xcoadicCHEZprotonmailPOINTcom
Accessible aux personnes à mobilité réduite : Oui
Pour Diderot (1713 - 1784) et Spinoza (1632 - 1677)), les humains sont des « machines » biologiques.
fr:Peter_Sloterdijk, allemand (1947 - )
Les 4 mécanismes d’homminisation (cf Peter Sloterdjik)
voir aussi la clairière selon Heidegger
“Umwelt” (de Sloterdjik) → technosphère = notre biotope
L’enjeu avec l’artificiel devient un enjeu nodal et une responsabilité cruciale pour les nouvelles formes d’homminisation dans lesquelles nous sommes.
L’artifice comme monde en soi : Monade (du grec μονάς , qui vient du mot μόνος, « unique ») est une structure complexe et fermée.
Notre insulation est devenue une hyperinsulation, le monde s’est rapproché, ses paroies externes (utérus de Sloterdjik) la sphère a épaissi leur paroi et individualisé l’espace de construction de soi.
Blogito ergo sum Monade // Nomade éprouvette = tour panoptique
Nouvelle écho-logie ?
Le système d’écho cybernétique avec des feedbacks permanents, on intéragit avec des interfaces qui sont des mécanismes précurseurs d’angoisse.
L’économie des désirs derrière la technolâtrie et ce nous “vend” le transhumanisme.
La techno vient conjurer nos peurs, elle vient nous rassurer. Aider à gérer et contrôler nos vies. Confort et sécurité dans un monde où les sollicitations augmentent, dans une insulation hyper c’est la technolâtrie rassurante. L’artifice précieux.
la question des précisions sur l'apparition du slogan 'Our bodies, Our rules', date exacte d'apparition, autrice·s / auteur·s, etc.
Voir c'était peut être sa version fr qui est apparue en 1ere Ou peut être depuis autre langue ?
une édition papier ou numérique de Women and Their Bodies, publié en 1970, New England Free Press, écrit par 13 activistes féministes de Boston. (135 pages)
Qui mènera ensuite en 1973 à l'ouvrage Our Bodies, Ourselves. (276 pages)
(Oui il y a une page wiki francophone https://fr.wikipedia.org/wiki/Our_Bodies,_Ourselves)
Une simple intuition de recherche. Je n'ai aucune garantie de trouver l'origine du slogan Our bodies, Our rules dans ces pages.
Autre intuition, Plonger dans l'origine du concept de sorcières https://www.theparisreview.org/blog/2017/10/30/the-inventions-of-witches/
Depuis le XV siècle¹ à aujourd'hui
Sur l'histoire politique et sociale de l'intime, lutte des Femmes, défiant les lois, pour leurs émancipation et Liberté.
Exemples : 1. Jesse Jones, appropriation de la sculpture Irlandaise Païenne Matriarcale Sheela Na Gig, montrant ses dents et exposant sa vulve.
Juste dessous 4 marteaux en spirale etoilante, outils d'émancipation, avec inscription “Thou shalt Not Suffer” détournement du Malleus Maleficarum
Livre ignoble du XV siècle qui est un Manuel de chasse, d'oppression et de torture des Femmes, appelées sorcières lorsqu'elles sont non soumises au dictat.
L'autrice coupe alors “Thou shalt Not Suffer a witch to live” (« tu ne permettras point aux sorcières de vivre ») pour marteler un « tu ne souffriras point »
Un broderie de Teresa Margolles, accompagnée avant la salle noir d'une vidéo immanquable.
Broderie avec des Femmes Mayas à partir des linceuls des Femmes mortes par violence.
Plongée dans la salle totalement noir après avoir visionné la vidéo sur les discussions qui accompagnent la confection de cette œuvre, objet traumatique et expression de compassion à la fois.
Puisqu'il y serait également possible que des femmes aient dès lors décrété Our bodies, Our rules en réponse aux textes ignobles de l'époque et aux actes abominables.
1: aussi siècle d'origine du concept tiers-lieux par des démonistes pour désigner et décrire le purgatoire
Le « Manifeste d'un Cypherpunk » d'Eric Hughes (1993) reprend les mêmes thèmes. Il s’agit pour lui de « préserver la vie privée » au moyen d’un « système d’échanges anonymes ». Les cypherpunks, dont il se réclame, ont alors pour tâche d’écrire des programmes de chiffrement, contre les gouvernements et les compagnies qui souhaitent, selon lui, rendre publiques tous les échanges afin d’asseoir leur contrôle. « Les Cypherpunks sont activement engagés à rendre les réseaux plus sûrs pour la vie privée. ».
Enfin, le « Cyberpunk Manifesto », de Christian As. Kirtchev (1997), en plus de reprendre les thèmes susdits (transactions anonymes, liberté totale de circulation des informations, etc.), s’amuse à décrire le mode de vie des cyberpunks et des hacktivistes du net, confirmant leur isolement et leur insociabilité. Le cyberpunk des années 1990 semble alors radicalement inadapté à son époque, écartelé entre sa référence à un genre littéraire qui n’existe plus et son aspiration à un univers ultra-technologisé qui n’est pas encore. « Nous vivons au bon endroit, mais pas au bon moment ».
Source CypherPunk
A Cypherpunk's Manifesto by Eric Hughes
Privacy is necessary for an open society in the electronic age. Privacy is not secrecy. A private matter is something one doesn't want the whole world to know, but a secret matter is something one doesn't want anybody to know. Privacy is the power to selectively reveal oneself to the world.
If two parties have some sort of dealings, then each has a memory of their interaction. Each party can speak about their own memory of this; how could anyone prevent it? One could pass laws against it, but the freedom of speech, even more than privacy, is fundamental to an open society; we seek not to restrict any speech at all. If many parties speak together in the same forum, each can speak to all the others and aggregate together knowledge about individuals and other parties. The power of electronic communications has enabled such group speech, and it will not go away merely because we might want it to.
Since we desire privacy, we must ensure that each party to a transaction have knowledge only of that which is directly necessary for that transaction. Since any information can be spoken of, we must ensure that we reveal as little as possible. In most cases personal identity is not salient. When I purchase a magazine at a store and hand cash to the clerk, there is no need to know who I am. When I ask my electronic mail provider to send and receive messages, my provider need not know to whom I am speaking or what I am saying or what others are saying to me; my provider only need know how to get the message there and how much I owe them in fees. When my identity is revealed by the underlying mechanism of the transaction, I have no privacy. I cannot here selectively reveal myself; I must always reveal myself.
Therefore, privacy in an open society requires anonymous transaction systems. Until now, cash has been the primary such system. An anonymous transaction system is not a secret transaction system. An anonymous system empowers individuals to reveal their identity when desired and only when desired; this is the essence of privacy.
Privacy in an open society also requires cryptography. If I say something, I want it heard only by those for whom I intend it. If the content of my speech is available to the world, I have no privacy. To encrypt is to indicate the desire for privacy, and to encrypt with weak cryptography is to indicate not too much desire for privacy. Furthermore, to reveal one's identity with assurance when the default is anonymity requires the cryptographic signature.
We cannot expect governments, corporations, or other large, faceless organizations to grant us privacy out of their beneficence. It is to their advantage to speak of us, and we should expect that they will speak. To try to prevent their speech is to fight against the realities of information. Information does not just want to be free, it longs to be free. Information expands to fill the available storage space. Information is Rumor's younger, stronger cousin; Information is fleeter of foot, has more eyes, knows more, and understands less than Rumor.
We must defend our own privacy if we expect to have any. We must come together and create systems which allow anonymous transactions to take place. People have been defending their own privacy for centuries with whispers, darkness, envelopes, closed doors, secret handshakes, and couriers. The technologies of the past did not allow for strong privacy, but electronic technologies do.
We the Cypherpunks are dedicated to building anonymous systems. We are defending our privacy with cryptography, with anonymous mail forwarding systems, with digital signatures, and with electronic money.
Cypherpunks write code. We know that someone has to write software to defend privacy, and since we can't get privacy unless we all do, we're going to write it. We publish our code so that our fellow Cypherpunks may practice and play with it. Our code is free for all to use, worldwide. We don't much care if you don't approve of the software we write. We know that software can't be destroyed and that a widely dispersed system can't be shut down.
Cypherpunks deplore regulations on cryptography, for encryption is fundamentally a private act. The act of encryption, in fact, removes information from the public realm. Even laws against cryptography reach only so far as a nation's border and the arm of its violence. Cryptography will ineluctably spread over the whole globe, and with it the anonymous transactions systems that it makes possible.
For privacy to be widespread it must be part of a social contract. People must come and together deploy these systems for the common good. Privacy only extends so far as the cooperation of one's fellows in society. We the Cypherpunks seek your questions and your concerns and hope we may engage you so that we do not deceive ourselves. We will not, however, be moved out of our course because some may disagree with our goals.
The Cypherpunks are actively engaged in making the networks safer for privacy. Let us proceed together apace.
Onward.
9 March 1993 source
Scientific literacy is necessary for a functioning society in the modern age. Scientific literacy is not science education. A person educated in science can understand science; a scientifically literate person can *do* science. Scientific literacy empowers everyone who possesses it to be active contributors to their own health care, the quality of their food, water, and air, their very interactions with their own bodies and the complex world around them.
Society has made dramatic progress in the last hundred years toward the promotion of education, but at the same time, the prevalence of citizen science has fallen. Who are the twentieth-century equivalents of Benjamin Franklin, Edward Jenner, Marie Curie or Thomas Edison? Perhaps Steve Wozniak, Bill Hewlett, Dave Packard or Linus Torvalds — but the scope of their work is far narrower than that of the natural philosophers who preceded them. Citizen science has suffered from a troubling decline in diversity, and it is this diversity that biohackers seek to reclaim. We reject the popular perception that science is only done in million-dollar university, government, or corporate labs; we assert that the right of freedom of inquiry, to do research and pursue understanding under one’s own direction, is as fundamental a right as that of free speech or freedom of religion. We have no quarrel with Big Science; we merely recall that Small Science has always been just as critical to the development of the body of human knowledge, and we refuse to see it extinguished.
Research requires tools, and free inquiry requires that access to tools be unfettered. As engineers, we are developing low-cost laboratory equipment and off-the-shelf protocols that are accessible to the average citizen. As political actors, we support open journals, open collaboration, and free access to publicly-funded research, and we oppose laws that would criminalize the possession of research equipment or the private pursuit of inquiry.
Perhaps it seems strange that scientists and engineers would seek to involve themselves in the political world — but biohackers have, by necessity, committed themselves to doing so. The lawmakers who wish to curtail individual freedom of inquiry do so out of ignorance and its evil twin, fear — the natural prey and the natural predator of scientific investigation, respectively. If we can prevail against the former, we will dispel the latter. As biohackers it is our responsibility to act as emissaries of science, creating new scientists out of everyone we meet. We must communicate not only the value of our research, but the value of our methodology and motivation, if we are to drive ignorance and fear back into the darkness once and for all.
We the biopunks are dedicated to putting the tools of scientific investigation into the hands of anyone who wants them. We are building an infrastructure of methodology, of communication, of automation, and of publicly available knowledge.
Biopunks experiment. We have questions, and we don’t see the point in waiting around for someone else to answer them. Armed with curiosity and the scientific method, we formulate and test hypotheses in order to find answers to the questions that keep us awake at night. We publish our protocols and equipment designs, and share our bench experience, so that our fellow biopunks may learn from and expand on our methods, as well as reproducing one another’s experiments to confirm validity. To paraphrase Eric Hughes, “Our work is free for all to use, worldwide. We don’t much care if you don’t approve of our research topics.” We are building on the work of the Cypherpunks who came before us to ensure that a widely dispersed research community cannot be shut down.
Biopunks deplore restrictions on independent research, for the right to arrive independently at an understanding of the world around oneself is a fundamental human right. Curiosity knows no ethnic, gender, age, or socioeconomic boundaries, but the opportunity to satisfy that curiosity all too often turns on economic opportunity, and we aim to break down that barrier. A thirteen-year-old kid in South Central Los Angeles has just as much of a right to investigate the world as does a university professor. If thermocyclers are too expensive to give one to every interested person, then we’ll design cheaper ones and teach people how to build them.
Biopunks take responsibility for their research. We keep in mind that our subjects of interest are living organisms worthy of respect and good treatment, and we are acutely aware that our research has the potential to affect those around us. But we reject outright the admonishments of the precautionary principle, which is nothing more than a paternalistic attempt to silence researchers by inspiring fear of the unknown. When we work, it is with the betterment of the community in mind — and that includes our community, your community, and the communities of people that we may never meet. We welcome your questions, and we desire nothing more than to empower you to discover the answers to them yourselves.
The biopunks are actively engaged in making the world a place that everyone can understand. Come, let us research together.
via biopunk | TheGeneHackMan, source
THE SLOW SCIENCE MANIFESTO
We are scientists. We don’t blog. We don’t twitter. We take our time.
Don’t get us wrong—we do say yes to the accelerated science of the early 21st century. We say yes to the constant flow of peer-review journal publications and their impact; we say yes to science blogs and media & PR necessities; we say yes to increasing specialization and diversification in all disciplines. We also say yes to research feeding back into health care and future prosperity. All of us are in this game, too.
However, we maintain that this cannot be all. Science needs time to think. Science needs time to read, and time to fail. Science does not always know what it might be at right now. Science develops unsteadily, with jerky moves and unpredictable leaps forward—at the same time, however, it creeps about on a very slow time scale, for which there must be room and to which justice must be done.
Slow science was pretty much the only science conceivable for hundreds of years; today, we argue, it deserves revival and needs protection. Society should give scientists the time they need, but more importantly, scientists must take their time.
We do need time to think. We do need time to digest. We do need time to misunderstand each other, especially when fostering lost dialogue between humanities and natural sciences. We cannot continuously tell you what our science means; what it will be good for; because we simply don’t know yet. Science needs time.
—Bear with us, while we think.
Source : Laboriacuboniks.net sous licence GNU Public License
Notre monde est pris de vertige. C’est un monde où l’invasion des nouveaux médias technologiques introduit dans nos vies quotidiennes un entrelacs d’abstraction, de virtualité et de complexité. XF façonne un féminisme adapté à ces réalités : un féminisme stratégique d’une ampleur et d’une portée inédites ; un avenir où la mise en œuvre de la justice de genre et de l’émancipation féministe contribuera à une politique universaliste édifiée à partir des besoins de chaque être humain, sans considération de race, d’aptitude, de situation économique ou géographique. Halte à la répétition sans avenir de la morne machine du capital, halte à la soumission à des tâches pénibles et ingrates, qu’elles soient productrices ou reproductrices, halte à la réification du donné déguisé en critique. Notre avenir exige un travail de dépétrification. XF n’est pas un appel à la révolution mais un pari sur le long terme de l’histoire, qui demande imagination, habileté et persévérance.
XF s’empare de l’aliénation comme d’un levier pour générer de nouveaux mondes. Nous sommes tous.tes aliéné.e.s – mais en a-t-il jamais été autrement ? C’est par le biais de notre condition d’aliéné.e.s, et non malgré elle, que nous pouvons nous libérer de la boue de l’immédiateté. La liberté n’est pas un donné – et en aucun cas n’est-elle donnée par quoi que ce soit de « naturel ». Construire la liberté implique non pas moins, mais davantage d’aliénation ; l’aliénation est la tâche réservée à la construction de la liberté. Rien ne devrait être admis comme figé, permanent ou « donné » – ni les conditions matérielles ni les formes sociales. XF mute, navigue et explore chaque horizon. Quiconque s’est vu jugé « non naturel » au regard des normes biologiques dominantes, quiconque a subi des injustices perpétrées au nom de l’ordre naturel, comprendra que la glorification de la « nature » n’a rien à nous offrir – les queers et les trans parmi nous, les porteur.euse.s de handicap, ainsi que ceux.celles ayant souffert de discrimination liées à une grossesse ou à des obligations relatives à l’éducation des enfants. XF est farouchement anti-naturaliste. Le naturalisme essentialiste empeste la théologie – le mieux est de l’exorciser au plus vite.
Pourquoi si peu d’efforts déclarés et concertés sont-ils faits pour redéfinir et réorienter les technologies à des fins politiques soucieuses de faire évoluer les questions de genre ? XF cherche à utiliser les technologies existantes de manière stratégique en vue de réagencer le monde. Ces outils sont porteurs de risques graves ; ils sont propices aux déséquilibres, aux mauvais traitements et à l’exploitation des plus faibles. Plutôt que de prétendre au risque zéro, XF préconise la nécessaire mise en place d’interfaces techno-politiques sensibles à ces risques. La technologie n’est pas en soi progressiste. Les utilisations qui en sont faites fusionnent avec la culture dans un cycle de rétroaction positive qui rend tout séquencement linéaire, toute prévision, toute prudence absolue, impossible. L’innovation technoscientifique doit s’assortir d’une pensée politique et théorique collective au sein de laquelle les femmes, les queers et ceux.celles qui ne se conforment pas aux normes de genre joueront un rôle sans précédent.
Pourquoi si peu d’efforts déclarés et concertés sont-ils faits pour redéfinir et réorienter les technologies à des fins politiques soucieuses de faire évoluer les questions de genre ? XF cherche à utiliser les technologies existantes de manière stratégique en vue de réagencer le monde. Ces outils sont porteurs de risques graves ; ils sont propices aux déséquilibres, aux mauvais traitements et à l’exploitation des plus faibles. Plutôt que de prétendre au risque zéro, XF préconise la nécessaire mise en place d’interfaces techno-politiques sensibles à ces risques. La technologie n’est pas en soi progressiste. Les utilisations qui en sont faites fusionnent avec la culture dans un cycle de rétroaction positive qui rend tout séquencement linéaire, toute prévision, toute prudence absolue, impossible. L’innovation technoscientifique doit s’assortir d’une pensée politique et théorique collective au sein de laquelle les femmes, les queers et ceux.celles qui ne se conforment pas aux normes de genre joueront un rôle sans précédent.
Le véritable potentiel d’émancipation de la technologie demeure inexploité. Nourrie par le marché, sa rapide croissance se jugule en flatulences, tandis que d’innovantes coquetteries sont concédées aux acheteur.se.s pour décorer un monde qui stagne. Transcendant le brouhaha de ces mauvaises lignes de code marchandisées, la tâche ultime consiste à concevoir des technologies aptes à lutter contre les inégalités d’accès aux outils reproducteurs et pharmacologiques, contre les catastrophes environnementales, contre l’instabilité économique et contre les formes dangereuses de travail sous/non payé. L’inégalité de genre caractérise encore les domaines dans lesquels nos technologies sont conçues, fabriquées et soumises à législation, tandis que les femmes employées dans l’industrie électronique (pour ne citer que celle-ci) accomplissent certaines tâches parmi les moins bien payées, les plus monotones et harassantes qui soient. Une telle injustice ne peut être corrigée que d’un point de vue structurel, machinique et idéologique.
Le xénoféminisme est un rationalisme. Prétendre que la raison ou la rationalité est « par nature » l’affaire du patriarcat revient à s’avouer vaincu.e.s. La version canonique de l’ « histoire de la pensée » est certes dominée par les hommes, et ce sont des mains d’hommes qui enserrent actuellement la gorge des institutions de la science et des technologies. Mais voilà précisément la raison pour laquelle le féminisme doit être un rationalisme – à cause de cet affreux déséquilibre, et non malgré lui. Il n’y a pas davantage de rationalité « féminine » que de rationalité « masculine ». La science n’est pas une expression mais une suspension du genre. Si notre époque est dominée par les égos masculins, c’est qu’elle est également en porte-à-faux avec elle-même elle est aussi en rupture avec elle-même – c’estet cette contradiction peut êtrequi doit être exploitée à notre avantage. La raison, comme l’information, aspire à la liberté. ce queEt le patriarcat ne peut pas le lui offrir. Le rationalisme lui-même doit être un féminisme. XF représente marque un point de rupture à partir duquel ces revendications peuvent être reconnues comme interdépendantes. XF désigne la raison comme un moteur d’émancipation féminine, et proclame le droit de chacun à parler en tant que n’importe qui et personne en particulier.
L’excès de modestie des programmes féministes de ces dernières décennies n’est pas de taille à affronter la monstrueuse complexité de notre réalité, une réalité tramée de câbles en fibre optique, d’ondes longues et courtes, d’oléoducs et de gazoducs, de routes terrestres et aériennes, et de l’exécution simultanée et continue, chaque milliseconde qui passe, de millions de protocoles de communication. La pensée systématique et l’analyse structurale ont été largement abandonnées au profit de luttes admirables mais insuffisantes, cantonnées à des localités précises et à des insurrections fragmentées. Alors que le capitalisme se comprend comme une totalité complexe et en expansion permanente, de nombreux projets qui se voudraient des vecteurs d’émancipation anticapitalistes craignent encore profondément de passer à l’universel, et s’opposent aux politiques spéculatives globales en les dénonçant comme d’inévitables vecteurs d’oppression. Cette fausse certitude traite les universaux comme autant d’absolus, et opère ainsi une dissociation délétère entre ce que nous cherchons à évincer et les stratégies que nous proposons pour y parvenir.
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La complexité du monde actuel nous confronte à des exigences éthiques et cognitives pressantes. Autant de responsabilités prométhéennes dont on ne peut se détourner. Une large part du féminisme du XXIème siècle – des vestiges de la politique identitaire postmoderne à de vastes pans de l’écoféminisme contemporain – lutte pour aborder ces défis de façon adéquate afin de permettre un changement réel et durable. Le xénoféminisme s’efforce de faire face à ces obligations en tant d’agents collectifs capables d’assurer une transition entre de multiples niveaux d’organisation politique, matérielle et conceptuelle.
Insatisfait.e.s par la seule analyse, nous sommes résolument synthétiques. XF préconise une alternance constructive entre description et prescription afin de mobiliser les effets récursifs que les technologies contemporaines peuvent avoir sur le genre, la sexualité et les disparités de pouvoir. Compte tenu de l’étendue des problèmes sexistes spécifiquement liés à la vie dans l’ère numérique – du harcèlement sexuel par le biais des média sociaux au doxxing en passant par le droit à la vie privée et la protection des images mises en ligne – la situation exige un féminisme à l’aise avec les technologies computationnelles. Aujourd’hui, il est impératif de mettre au point une infrastructure idéologique qui soutienne et facilite les interventions féministes au sein des éléments connectés du monde contemporain. Le xénoféminisme est davantage qu’une stratégie d’auto-défense numérique et qu’un mouvement d’émancipation vis-à-vis des réseaux patriarcaux. Nous voulons cultiver la pratique de la liberté positive – la liberté de plutôt que vis-à-vis de – et nous appelons les féministes à acquérir les compétences nécessaires à la reconversion des technologies existantes et à l’invention d’outils matériels et cognitifs novateurs répondant à des objectifs communs.
Les formes en évolution (et aliénantes) des médias technologiques offrent des opportunités radicales qui ne doivent plus être mises au seul service des intérêts du capital, lequel ne profite, et à dessein, qu’à une minorité. Les outils à annexer prolifèrent sans cesse, et si nul ne peut prétendre les maîtriser totalement, les outils numériques n’ont jamais été aussi largement distribués et aussi facilement appropriable. L’affirmer n’est pas oublier les effets nuisibles de l’expansion de l’industrie technologique sur de nombreuses populations démunies (des ouvrier.ère.s d’usine employé.e.s dans des conditions abominables aux villages ghanéens transformés en entrepôts pour les e-déchets des pouvoirs mondiaux), mais c’est au contraire reconnaître explicitement ces effets comme une cible à éliminer. De même que l’invention de la bourse fut aussi celle du crash boursier, le xénoféminisme sait que l’innovation technologique doit anticiper activement ses conditions systémiques.
XF rejette l’illusion et la mélancolie comme des facteurs d’inhibition politique. L’illusion, ou la croyance aveugle que les plus faibles peuvent l’emporter sur les plus forts sans coordination stratégique, se solde par des promesses non tenues et des énergies non canalisées. C’est une politique qui, parce qu’elle en veut tellement, finit par construire très peu. Sans l’action d’une organisation sociale collective de grande envergure, clamer son désir de changement planétaire ne peut rester qu’un vœu pieux. D’un autre côté, la mélancolie – qui sévit très fortement à gauche – voudrait nous apprendre que l’émancipation est une espèce éteinte sur laquelle pleurer et qu’on ne peut guère espérer davantage que quelques soubresauts de négation. Au pire, une telle attitude ne génère rien que de la lassitude politique ; au mieux, elle installe une atmosphère de désespoir généralisé qui dégénère trop souvent en querelles intestines et en petites leçons de morale. Le mal de la mélancolie ne fait que renforcer l’inertie politique, et – sous couvert de réalisme – renonce à tout espoir de pouvoir jamais reconfigurer le monde. C’est contre ce genre de maux que vaccine XF.
Les politiques qui prétendent détourner les courants de l’abstraction mondiale mais se bornent en réalité à valoriser exclusivement le local nous paraissent insuffisantes. Faire scission avec la machinerie capitaliste, ou la renier, ne la fera pas disparaître. De même, suggérer d’actionner le frein d’urgence des vitesses embarquées, appeler à ralentir et à revoir à la baisse, est une option réservée à une minorité – un type très violent d’exclusivité – qui finirait par représenter une catastrophe pour la majorité. Refuser de penser au-delà de la microcommunauté, d’encourager la mise en rapport des insurrections disparates, de réfléchir à une façon d’optimiser les tactiques émancipatrices en vue de leur possible déclinaison universelle, c’est se satisfaire de gestes défensifs et temporaires. XF est une créature affirmative dotée d’une stratégie offensive, insistant avec véhémence sur la possibilité d’un changement social à grande échelle pour tous les étrangers que nous sommes.
Le sens du caractère volatile et artificiel du monde semble avoir déserté la politique féministe et queer contemporaine à la faveur d’une constellation plurielle mais statique d’identités de genre, où les sombres équations du bien et du naturel se voient rétablies avec obstination. Bien que nous ayons (peut-être) admirablement contribué à rehausser les seuils de « tolérance », on nous enjoint trop souvent à chercher du réconfort dans la non-liberté, à revendiquer le fait d’être « né » ainsi, comme pour nous offrir une excuse par la grâce de la nature. Pendant ce temps-là, le centre hétéronormé se porte bien, merci. XF remet en cause ce référent centrifuge, sachant pertinemment que le sexe et le genre sont l’exemple même du point pivot entre norme et fait, entre liberté et contrainte. Orienter ce pivot vers la nature constitue au mieux une concession défensive, et une régression par rapport à ce qui fait de la politique trans et queer davantage qu’un simple groupe de pression – à savoir une exigeante affirmation de liberté vis-à-vis d’un ordre qui semblait immuable. Comme dans tout mythe du donné, l’histoire d’une fondation stable est inventée en lieu et place d’un monde réel régi par le chaos, la violence et le doute. Le « donné » est séquestré dans le domaine privé comme une certitude, alors qu’il cède du terrain sur le front des conséquences publiques. Lorsque changer de sexe est devenu une possibilité réelle et connue de tous, le cercueil abrité par le tombeau de la Nature s’est fissuré, laissant de nouvelles histoires – grouillant de futurs possibles – s’échapper du vieil ordre du « sexe ». La grille disciplinaire du genre est en grande partie une tentative de réparer cette fondation détruite et de dompter les vies qui s’en sont échappées. Le temps est venu de démolir entièrement ce tombeau, et non de s’incliner devant lui en mendiant des excuses pour la petite marge d’autonomie acquise.
Si le « cyberspace » a pu un temps offrir la promesse d’une sortie hors des restrictions imposées par les catégories identitaires essentialistes, le climat des médias sociaux contemporains a a basculé dans une autre direction, devenant le théâtre sur les marches duquel se joue ces cérémonies de prosternation devant l’identité. Avec ces pratiques curatoriales viennent les rituels puritains du maintien de la morale, et ces estrades sont souvent envahies par les des plaisirs inavoués de l’accusation, de l’humiliation et de la dénonciation. De précieuses plateformes pour connecter, organiser et partager des compétences se trouvent ainsi paralysées par des obstacles aux débats productifs, et qui se présentent eux-mêmes comme des lieux de débat. Ces politiques puritaines de la honte – qui fétichisent l’oppression comme s’il s’agissait d’un bienfait et brouillent les cartes à coup de délires moralisateurs – nous laissent de marbre. Nous ne voulons ni les mains propres ni la belle âme, ni la vertu ni la terreur. Nous voulons des formes supérieures de corruption.
Concevoir des plateformes d’émancipation et d’organisation sociale, par conséquent, nécessite obligatoirement de prendre en compte les mutations sémiotiques et culturelles que ces plateformes permettent. Ce qui doit être repensé, ce sont les parasites mémétiques qui suscitent et coordonnent les comportements selon des mécanismes obstrués par l’image de soi de leurs hôtes ; faute de cela, des mèmes comme l’ « anonymat », l’ « éthique », la « justice sociale » et le « privilege-checking »1 continueront d’héberger des dynamismes sociaux en contradiction avec les intentions souvent louables qui les soutiennent. Pour être atteinte, la maîtrise de soi collective requiert une manipulation hyperstitieuse des ficelles du désir et l’usage d’opérateurs sémiotiques sur un terrain constitué de systèmes culturels hautement interconnectés. La volonté sera toujours corrompue par les mèmes à travers lesquels elle circule, mais rien ne nous empêche d’instrumentaliser ce fait, et de le calibrer en fonction du but qu’il cherche à atteindre.
e xénoféminisme est abolitionniste du genre. « L’abolitionnisme du genre » n’est pas le nom de l’éradication, au sein de la population humaine, de ce qu’on considère actuellement comme des traits « genrés ». Dans une société patriarcale, un tel projet ne peut mener qu’au désastre – tant l’idée de ce qui est « genré » se rapporte au féminin en proportion excessive. Mais même si l’équilibre était redressé, réduire la diversité sexuelle du monde ne nous intéresse aucunement. Que des centaines de sexes fleurissent ! La formule d’ « abolitionnisme du genre » désigne l’ambition de construire une société dans laquelle les traits actuellement rangés sous l’étiquette du genre ne fourniraient plus la grille d’un fonctionnement asymétrique du pouvoir. « L’abolitionnisme de race » déploie une formule semblable en affirmant que la lutte doit continuer jusqu’à ce que les caractéristiques actuellement racialisées ne soient pas davantage prétexte à discrimination que la couleur des yeux. Finalement, tout abolitionnisme émancipatoire doit avoir pour horizon l’abolitionnisme de classe, étant entendu que c’est au sein du système capitaliste que se rencontre l’oppression sous sa forme transparente et dénaturalisée : on n’est pas exploité.e ou victime d’oppression parce qu’on est un.e travailleur.se salarié.e ou un.e pauvre ; on est un.e travailleur.se ou un.e pauvre parce qu’on est exploité.e.
Pour le xénoféminisme, la viabilité de tout projet abolitionniste émancipatoire – l’abolition des classes, des genres et des races – dépend d’une profonde révision de l’universel. L’universel doit être compris comme générique, c’est-à-dire comme intersectionnel. L’intersectionnalité n’est pas le morcellement des collectifs en un duvet statique d’identités croisées, mais une orientation politique qui tranche dans la masse des particuliers, et refuse l’étiquetage grossier des corps. C’est un universel qui ne peut pas s’imposer d’en haut, mais doit s’édifier à partir de la base – ou, mieux, latéralement, en ouvrant de nouvelles lignes de transit à travers un paysage irrégulier. Cette universalité générique, non absolue, doit se garder de tout amalgame simpliste avec les particuliers ballonnés et faussement anonyme de l’universalime eurocentrique où le mâle vient se confondre avec le neutre, le blanc avec le sans race, le cis avec le réel, etc. Faute d’un tel universel, l’abolition des classes ne peut demeurer qu’un fantasme bourgeois, l’abolition des races un suprématisme blanc qui ne dit pas son nom, et l’abolition du genre une misogynie à peine voilée, même – et surtout – lorsque celle-ci est prônée par des féministes déclarées (comme le ridicule et dangereux spectacle de tant de campagnes d’ « abolitionnistes du genre » auto-proclamées contre les femmes trans le montre trop bien ).
Les postmodernes nous ont appris à brûler les façades du faux universel et à dissiper ce genre de confusions ; et les modernes à dégager les nouveaux universaux des cendres du faux. Le xénoféminisme cherche à construire une politique coalitionnelle, une politique désinfectée de toute pureté. Manier l’universel requiert des compétences sérieuses et une introspection minutieuse afin d’en faire un outil prêt à l’emploi pour des corps politiques multiples, et une chose qu’on puisse s’approprier pour lutter contre toutes les oppressions relatives au genre et à la sexualité. L’universel n’est pas un schéma préconçu, et plutôt que de dicter son utilisation à l’avance, XF s’offre comme une plateforme. Le processus lui-même de la construction est par conséquent compris comme une remodélisation permanente, itérative et néguentropique. Le xénoféminisme se veut une architecture évolutive qui, à la manière d’un logiciel open source, reste susceptible de modifications et d’améliorations perpétuelles suivant l’élan navigationnel du du raisonnement éthique militant. Mais « open/ouvert » ne veut pas dire « non dirigé ». Les systèmes les plus durables doivent leur stabilité à la manière dont ils parviennent à faire de l’ordre une « main invisible » émergeant d’une apparente spontanéité ; ou dont ils exploitent l’inertie de l’investissement et de la sédimentation. Nous n’hésiterons pas à nous inspirer de nos adversaires, ni des réussites ou des échecs de l’histoire. Fort de ce savoir, XF cherche des manières d’implanter un ordre à la fois équitable et juste, et de l’injecter dans la géométrie des libertés que ces plateformes permettent.
Notre sort est aux mains de la technoscience, un domaine où rien n’est à ce point sacré qu’on ne puisse le repenser et le transformer de façon à élargir notre marge de liberté, pas même le genre ni l’humain. Dire que rien n’est sacré, que rien n’est transcendant ou immunisé contre la volonté de savoir, de bricoler et de hacker, c’est dire que rien n’est supernaturel. La « Nature » – comprise ici comme l’arène illimitée de la science – voilà tout ce qui est. Et ainsi, en révoquant la mélancolie et l’illusion, le manque d’ambition et le non modulable, le puritanisme libidineux de certaines cultures internet, et la Nature conçue comme un donné impossible à refaçonner, nous découvrons que notre antinaturalisme normatif nous a conduit.e.s à un naturalisme ontologique indéfectible. Nous affirmons qu’il n’y a rien qui ne puisse être étudié de manière scientifique et manipulé par la technologie.
Non que la distinction entre l’ontologique et le normatif, entre le fait et la valeur, soit nette et tranchée. Les vecteurs de l’antinaturalisme normatif et du naturalisme ontologique quadrillent de nombreux champs de bataille ambivalents. Comme la volonté de connaissance, le projet visant à démêler ce qui devrait être de ce qui est, à dissocier la liberté des faits, et la volonté de la connaissance, constitue bel et bien une tâche infinie. Subsistent de nombreuses zones troubles où le désir nous confronte à la brutalité des faits, où la beauté s’avère indissociable de la vérité. La poésie, le sexe, la technologie et la douleur rayonnent de cette tension que nous venons de décrire. Mais qu’on renonce à ce travail de révision, qu’on donne du mou et qu’on relâche cette tension, et ces filaments de lumière s’affaiblissent immédiatement.
Les possibilités qu’offrait la première culture, textuelle, de l’internet – résister aux régimes de genres répressifs, générer une solidarité parmi les groupes marginalisés et créer ces nouveaux espaces d’expérimentation qui furent à l’origine du cyberféminisme des années 1990 – se sont nettement réduites au XXIème siècle. La prédominance du visuel dans les interfaces en ligne actuelles a réinstauré des modes bien connus de politique identitaire, des relations de pouvoir et des normes de genre dans la représentation de soi. Mais cela ne signifie pas que les sensibilités cyberféministes appartiennent au passé. Démêler les possibilités subversives des possibilités oppressives latentes du web actuel requiert un féminisme sensible au retour insidieux des anciennes structures de pouvoir, également assez malin pour savoir exploiter le potentiel ainsi offert. Les technologies numériques sont inséparables des réalités matérielles qui les sous-tendent ; toutes deux sont articulées de telle manière que les unes peuvent être utilisées pour modifier les autres à des fins différentes. Plutôt que de militer pour la primauté du virtuel sur le matériel, ou du matériel sur le virtuel, le xénoféminisme repère leurs points de puissance et d’impuissance respectifs afin d’employer cette connaissance pour intervenir de manière efficace sur notre réalité conjointe.
Intervenir sur des hégémonies plus manifestement matérielles est tout aussi décisif que d’intervenir sur des hégémonies numériques et culturelles. Les changements apportés à l’environnement bâti sont porteurs des plus significatives avancées en vue d’une reconfiguration des horizons des femmes et des queers. En tant qu’incarnation de constellations idéologiques, la production d’espace et les décisions que nous prenons quant à son organisation sont en définitive à la fois des articulations de ce « nous » et, réciproquement, des manières dont ce « nous » peut être articulé. Parce qu’elles ont le pouvoir de forclore, de restreindre ou au contraire d’ouvrir les conditions sociales de l’avenir, les xénoféministes doivent se familiariser avec le langage de l’architecture qui est aussi le vocabulaire d’une choré-graphie collective – une écriture concertée de l’espace.
De la rue à la maison, l’espace domestique ne doit pas non plus se dérober à nos tentacules. Ses racines sont si profondes qu’on l’a décrété impossible à desceller, la maison comme norme devenant par cette opération la maison comme fait, comme donné impossible à refaçonner. Le « réalisme domestique », abrutissant, n’a pas sa place dans notre horizon. Bâtissons des maisons augmentées de laboratoires communs, de médias communautaires et d’équipements techniques ! La maison est prête pour une transformation spatiale, dimension inhérente à tout projet de futur féministe. Mais cela ne peut s’arrêter aux grilles du jardin. Nous percevons trop bien qu’actuellement, réinventer la structure familiale et la vie domestique ne peut se faire qu’au prix d’un retrait de la sphère économique – l’alternative de la communauté – ou d’une prise en charge décuplée du fardeau qu’elles constituent – l’alternative du parent unique. Si nous voulons rompre l’inertie qui concourt au maintien de la figure moribonde de la famille nucléaire, dont l’œuvre consciencieuse a été d’isoler les femmes de la sphère publique, et les hommes des vies de leurs enfants, tout en pénalisant ceux.celles qui s’en écartent, nous devons refondre l’infrastructure matérielle et briser les cycles économiques qui la maintiennent en place. La tâche qui nous attend est double, et notre vision nécessairement stéréoscopique : nous devons concevoir une économie qui affranchit le travail reproductif et la vie de famille, tout en construisant des modèles de familialité dégagés de la corvée abrutissante du travail salarié.
De l’espace de la maison à celui du corps, il est urgent d’articuler une politique proactive pour l’intervention et les hormones biotechniques. Les hormones hackent les systèmes de genre, et possèdent une portée politique qui excède le calibrage esthétique des corps individuels. Pensée de manière structurelle, la distribution des hormones – à qui/quoi cette distribution donne-t-elle la priorité, ou qui/que pathologise-t-elle – est d’une importance capitale. La montée en puissance de l’internet et l’hydre des pharmacies clandestines qu’elle a déchaînée – assortie d’archives de connaissances endocrinologiques en accès libre – a joué un rôle clé en arrachant le contrôle de l’économie hormonale aux mains des institutions « obstructionnistes » qui cherchaient à écarter les menaces pesant sur les distributions établies du sexuel. Mais troquer le règne des bureaucrates contre le marché ne constitue pas une victoire en soi. Il faut viser beaucoup plus haut. Nous voulons savoir si l’idiome de « hacking de genre » peut se déployer dans une stratégie à long terme, une stratégie qui organiserait pour le wetware ce que la culture hacker a déjà accompli pour le software – la construction d’un univers entier de plateformes free et open source, soit ce qui se rapproche le plus, de l’avis et de l’expérience de beaucoup d’entre nous, d’un communisme viable. Sans risquer des vies de manière inconsidérée, peut-on nouer les promesses embryonnaires portées par l’impression pharmaceutique 3D (« Reactionware »), les cliniques populaires d’avortement télémédical, les forums d’hacktivistes du genre et de DIY-HRT2, etc., en vue d’aménager une plateforme de médecine free et open source ?
De l’échelle mondiale à l’échelle locale, de la troposphère à nos corps, le xénoféminisme revendique sa responsabilité dans la construction de nouvelles institutions de proportions technomatérialistes hégémoniques. À l’instar d’ingénieurs qui devraient concevoir une structure d’ensemble ainsi que les éléments moléculaires qui la compose, XF insiste sur l’importance de la sphère mésopolitique à la fois contre l’efficacité limitée des actions locales, de la création de zones autonomes et de l’horizontalisme absolu, ainsi que contre toute tentative d’imposer des valeurs et des normes en s’instituant comme autorité supérieure ou en prônant une quelconque transcendance. L’arène mésopolitique des ambitions universalistes du xénoféminisme se comprend comme un réseau mobile et intriqué de lignes de transit entre ces polarités. En pragmatistes, nous appelons à la contamination comme à un moteur de mutation entre de telles frontières.
XF affirme qu’adapter notre comportement à la complexité prométhéenne de l’ère actuelle est un travail qui requiert de la patience, mais une patience acharnée qui n’a rien de l’ « attente ». Calibrer une hégémonie politique ou un méméplexe séditieux implique non seulement la création d’infrastructures matérielles pour rendre explicites les valeurs que portent ces organismes, mais impose aussi certaines exigences aux sujets que nous sommes. Comment allons-nous habiter ce nouveau monde ? Comment construire un meilleur parasite sémiotique – un parasite qui suscitera les désirs que nous voulons désirer, et qui orchestrera non pas une orgie autophage d’indignité ou de colère, mais une communauté égalitaire et émancipatrice soutenue par de nouvelles formes de solidarité désintéressée et de maîtrise de soi collective ?
Le xénoféminisme est-il un programme ? Pas si le terme se rapporte à quelque chose d’aussi rudimentaire qu’une recette, ou qu’un outil à emploi unique censé résoudre un problème déterminé. Nous préférons penser comme un.e développeu.r.seuse informatique, qui cherche à élaborer un nouveau langage à l’intérieur duquel le problème posé est immergé, de sorte que les solutions qui seront apportées, à ce problème précis et à d’autres qui lui sont liés, pourront éclore facilement. Le xénoféminisme est une plateforme, l’ambition naissante de construire le nouveau langage d’une politique sexuelle – un langage qui se saisit de sa propre méthode comme d’un matériel à retravailler, et qui s’auto-engendre de manière progressive. Nous savons que les problèmes auxquels nous sommes confronté.e.s sont systémiques et imbriqués, et que notre unique chance de réussir à l’échelle mondiale est d’implanter la logique de XF dans une myriade de compétences et de contextes différents. Notre transformation est celle d’une infiltration, d’une subsomption dirigée plutôt que d’un renversement expéditif ; c’est une transformation qui procède d’une construction mûrement réfléchie, visant à noyer le patriarcat capitaliste de suprématie blanche dans une mer de procédures qui viendra ramollir sa carapace et démanteler ses défenses. Ainsi sera-t-il possible, avec les restes qu’on nous a laissés, de construire un nouveau monde.
Le xénoféminisme indexe le désir de construire un futur autre avec un X triomphant sur un plan interactif. Ce X ne symbolise pas une destination. Il est l’introduction d’une keyframe-topologique pour l’élaboration d’une nouvelle logique. En proclamant un avenir désentravé de la répétition du présent, nous militons pour des capacités ampliatives, pour des espaces de liberté à géométrie plus riche que celles de l’allée, de la chaîne de montage et du bac d’alimentation. Nous avons besoin de nouvelles capacités de perception et d’action dont le champ ne soit pas réduit par les identités naturalisées. Au nom du féminisme, la « Nature » ne doit plus être un refuge d’injustice, ou le fondement de quelque justification politique que ce soit !
Si la nature est injuste, changez la nature !
Traduit de l’anglais par Marie-Mathilde Burdeau. Merci a nos amis de Glass Bead!
glass-bead.org
« L'objectif de Gynepunk est de faire émerger des laboratoires de diagnostic accessibles à faire soi-même (Do It Yourself), à faire avec d'autres (Do It Together), et des techniques d'expérimentation » ; ces techniques sont « basées sur la méthodologie et la discipline scientifique et sur l'expérience de chaque corps est aussi source de connaissance (la sagesse du corps ancestral). C'est pourquoi la documentation, la mémoire sous toutes ses formes, est essentielle ! ».
Les membres de ce collectif sont souvent affublées de « sorcières punks » ou « sorcières cyborg » dans la presse ou dans des conférences parlant à leur place. Ceci est souvent fait sans rappeler l'historique et l'imaginaire (encore véhiculé aujourd'hui ) de la « chasse aux sorcières » et des châtiments mortels après tortures, souvent reflets d'une société qui persécute des femmes (sorcières) et/ou les sujets du féminisme blasphème des frontières de la société (punks, cyborg). La page wiki du collectif, qui introduit sa démarche et sa documentation, dévoile son slogan, en réponse à tout cela : « no body can burn US ! NO ONE ! the witches NOW have the flames » (« GynePUNK » s. d.).
DEScolonización Científica/Visceral
Medical institutions use prohibitive and creepy technologies, patriarchal conservatives and dark methodologies to diagnosis, to read them and apply their vivisection treatments. In gynecology particular case, it's reach an inquisitive, paternalistic and fascistic attitudes.
To make a fucking simple yeast or gardenella exam, for name any, it seem not enough to swallow tortuous waiting rooms of the CAP (public assistance health centers), or being compel to answer (as accumulated vomits) bureaucratic, statistical forms that performs a role of popular judges of your practices, capacities or choices. Gossip questions full of moral pervert scorn, seeking data about your promiscuity, drug use, sexual orientation, hygienic practices, or squat relations… just cause how your look! & don't mention abortion, now is just like talk about sorcery!! a politic anachronism!
The technical control of the diagnosis generates extreme dependence an a classicist deep gap of knowledge. Patients are ignorant slaves of lab diagnosis technologies that send a message only translated and read by the doctors that in some kind of possession of the clinic oraculo have the only sacred truth. Gynepunk 5.png
BUT… There's no need of hi-tech machines for some tests! not even phd`s in microbiologic surgery to generate accurate and self-aware diagnosis.
I don't want to be forced to enter into their hygienist temples, in veiled body jails, in those fabrics of corporal standardization and sickness limited parameters. I want glandular heretics, akelarres gynepunks, DIY abortive pots, midwife gangs, glitter abortions, spill placenta in every corner, hack analytic technics, ephemeral biolabs, DIT labs, hi-tech nursery secret meetings, black coats, chess coats. Self blood donations & extract our own blood, and trough it like a furious volcanic river of our anger in the door of the fucking parlament!! gynepunk is a extreme and accurate gesture to detach our boudy of the compulsive dependency of the fossil structures of the hegemonic health system machine.
gynepunk's objective is to make emerge DIY-DIT accessible diagnosis labs and technics in extreme experimentation, down the rocks or elevators if is necesary. Has to be possible in a situated stable place or/and in nomadic mobile labs. Has to be able to perform as much as WE WANT, in a intensive way: smears, fluid analysis, biopsy, PAPs, synthesize hormones at will, blood exams, urinalysis, HIV tests, pain reliefs, or what ever WE NEED. Hack and build our own ultrasound, endoscope or ecography devices in a low-cost way. All this in a strict complementation with herbs and natural knowledges, oral traditions, submarine recipes, seeking with hunger generate superavit of DIY lubricants, anti-conceptives, open doula domains, savage caring of any visceral hands on technologies, as menstrual extraction, all elevated at maximun potential of common learning and radical self-body-power…!
gynepunk is based in scientific methodology and discipline and in the knowledge that comes thought the experience of each body, ancestral body wisdom, that's why documentation, memory in any form is essential! in ANY format: visual treasures, sound mines, microscopic riddles, biologic cabinets, microbiologic growing centers, online seedbanks, fluids archives, fanzine-paper sms, oral decoding chorus, self vudu healing rituals. Like this other gynepunks will ferment and mutate going fast forward to a explosive and expansive movement towards radical experiments, collective strong confidence, to build our-body politics. Something that is Vital to share and spread in infinite pandemoniums.
no body can burn US! NO ONE!
the witches NOW have the flames Ahora las brujas tenemos las llamas Source Voir également AnarchaGLAM SPELL