Voir the_other_selves._on_the_phenomenon_of_t.pdf
Le Bioart met en évidence la problématisation de la relation entre les éléments “humains” facilement reconnaissables et les opérations constitutives non humaines qui les traversent. Cette exploration inclut la question cruciale et ouverte de savoir si et comment nous pouvons construire une éthique commensurable aux reformulations de l'agence, de l'identité, de la collectivité, et même de la liberté, que de telles œuvres d'art peuvent imposer par leurs points de vue inhumains. Nous nous tournons vers le cadre conceptuel matérialiste et naturaliste du philosophe du XVIIe siècle Baruch Spinoza comme ressource pour esquisser une éthique immunologique qui peut mieux réfléchir à la subjectivité éthique des pronoms réflexifs de la 3e personne.“ (Felix Navarrete)
« Je ne suis pas François-Joseph Lapointe. 50% des cellules de mon corps ne sont pas des cellules humaines. 99% des gènes de mon corps ne sont pas des gènes humains. Toutes mes actions affectent qui je suis. Toutes mes rencontres changent qui je suis. Je ne suis plus vraiment humain. Je suis la somme de mon génome et du génome de toutes les bactéries qui vivent sur moi, autour de moi, à l’intérieur de moi. Je suis un superorganisme. »
La révolution génomique change la perception de notre corps. C’est ce qu’explore le biologiste et chorégraphe canadien François-Joseph Lapointe. Avec un goût immodéré pour les échanges bactériens.
« Je ne suis pas François-Joseph Lapointe. 50% des cellules de mon corps ne sont pas des cellules humaines. 99% des gènes de mon corps ne sont pas des gènes humains. Toutes mes actions affectent qui je suis. Toutes mes rencontres changent qui je suis. Je ne suis plus vraiment humain. Je suis la somme de mon génome et du génome de toutes les bactéries qui vivent sur moi, autour de moi, à l’intérieur de moi. Je suis un superorganisme. »
C’est ainsi que François-Joseph Lapointe s’adressait au public lors de la rencontre Laser organisée ce printemps par l’association Leonardo-Olats et la diagonale Paris-Saclay chez agnès b. On ne saurait dire si François-Joseph Lapointe n’est plus vraiment humain, c’est en tout cas un artiste et biologiste qui porte la performance sur son propre corps, qu’il s’agisse de serrer la main de mille personnes pour étudier la contamination ou de manger une chauve-souris « dans l’espoir de devenir Batman » et ainsi réaliser un « égoportrait métagénomique ».
Côté sciences, par là où il a commencé sa carrière, ce directeur du laboratoire d’écologie moléculaire et d’évolution à l’université de Montréal travaille sur l’application des méthodes statistiques de la théorie des graphes à la phylogénétique et à la génétique des populations. Côté art, son œuvre repose sur la biologie et les micro-organismes, en s’appuyant sur la chorégraphie, la performance et la création visuelle et graphique. Pour «1000 Handshakes», François-Joseph Lapointe doit d’abord serrer des mains… …Avant qu’on prélève un échantillon de sa paume pour vérifier la contamination.
François-Joseph Lapointe est un specimen de « paradisciplinarité ». Le chercheur creuse côté artistique les possibilités en performance relationnelle de la métagénomique, ou génomique environnementale, une science dérivée de la génomique.
Le séquençage du génome humain a duré pas moins de treize ans (de 1990 à 2003). Aujourd’hui, grâce à la métagénomique, le séquençage prend une semaine. Cette technique permet d’identifier les champignons, bactéries, etc., que l’on trouve dans l’environnement, et permet d’étudier la communauté d’organismes que nous avons en nous.
La métagénomique a conduit au projet microbiote humain (Human Microbiome Project ou HMP en anglais) qui a notamment révélé en 2012 que nous étions composés à 99% de gènes de bactéries et que différentes parties du corps sont associées à différents micro-organismes. Suite aux découvertes du projet du microbiote humain, il y a maintenant une explosion en métagénomique. On dénombre des projets de microbiotes intestinal, cutané, facial, ombilical, dentaire, vaginal, mammaire, séminal, conjugal, néonatal, alimentaire, fécal, canin, félin, floral, domestique, téléphonique et même intersidéral (ISS)…
Mycophone_unison se présente comme une métaphore des questionnements sur l’identité corporelle à l’aune des récentes découvertes sur le microbiome humain. À l’extrémité d’une large plateforme représentant une carte du ciel, le spectateur est invité à activer un détonateur. Par cette simple action, un signal est acheminé vers l’unité centrale de la plateforme. Celle-ci consiste en un disque perforé équipé de transistors optiques qui produisent un son rythmé, ponctué d’un jeu de lumières. Le son émis est ensuite modulé par son passage par trois boites de Petri, chacune contenant des microorganismes prélevés sur diverses parties du corps des trois créateurs. De cette action résulte une série de sons, toujours différente. En effet, puisque les microbiomes présents sont vivants, et donc en constant développement, la résistance électronique produite lors du passage du signal est à chaque fois quelque peu modifiée, transformant par le fait même la séquence sonore. En prenant part à ce système, le spectateur entre lui aussi dans cette «interconnectivité globale», tandis qu’un lien symbolique est établi entre son corps, le corps des créateurs et le corps céleste. Ce faisant, l’œuvre rappelle l’influence de l’environnement sur notre identité corporelle, le corps devant plus que jamais être compris comme un écosystème ouvert. D’ailleurs, les boites de Petri incluses dans l’installation œuvrent également en ce sens. L’ajout de charbon à la gélose, qui sert de médium de culture, forme un arrière-fond noir où se déploient les microorganismes, créant ainsi une confusion entre les niveaux micro et macro. Cela rappelle que des changements mineurs à notre microbiome sont suffisants pour provoquer des effets à l’échelle de notre santé et même de nos comportements, témoignant ainsi de la nature dynamique et multiple de notre corps.
Myconnect en tant que connecteur symbiotique interspécifique composé d'organismes avec son circuit de signaux et d'impulsions, qui sont générés et traduits par des organismes biologiques et technologiques réalise une expérience immersive d'interdépendance symbiotique.
Dans la capsule Myconnect, le système nerveux d'une personne est intégré dans la boucle de rétroaction du mycélium de l'interface humaine par les battements du cœur. Les oscillations de résistance électrique du mycélium génèrent un décalage temporel du battement cardiaque entrant, qui est retransmis au corps humain par des impulsions sensorielles sonores, lumineuses et haptiques. L'expérience sensorielle transférée du corps tente d'indiquer la dépendance de la compréhension de la réalité par rapport aux impulsions sensorielles de l'environnement, tandis que le lien symbiotique souligne l'intégration de l'être humain dans le réseau multicouche de son habitat.